Aldrovanda,
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Mise à jour : vendredi 4 mars, 2011


Les explications qui touchent à Aldrovanda sont toujours assez longues à développer. Le but initial de cet article était surtout de rapporter les résultats très positifs que j'avais obtenu et vous dévoiler mes trucs de culture. Je n'avais aucune information spécifique pour la forme rouge australienne que j'ai utilisée en premier, à part le fait qu'elle pousse à une température de l'ordre de 20°C. Je disposais des deux clones provenant des deux sites connus à l'époque.

J'ai expérimenté différentes combinaisons avec cette forme que j'avais alors le plus abondamment mais j'ai disposé ensuite d'une forme tempérée d'origine polonaise et de la forme tropicale type australienne.

A signaler que l'Aldrovanda rouge australien en serre froide se comporte exactement comme les autres, contrairement à ce qu'on lit quelquefois, puisque des turions se forment ! Cela voudrait dire qu'il ne s'agit pas d'une forme tropicale, voire qu'il y a des différences morphologiques selon les provenances mais pas d'ordre climatique.

J'ai ajouté une théorie toute personnelle expliquant la disparition de France de cette plante, et ce n'est pas la pollution !

Vous trouverez en bas de page quelques documents complémentaires : photo au microscope, vidéo de fermeture...

© 2008 CarniBase

L'Aldrovanda est une plante aquatique carnivore qui poussait en France il y a encore quelques dizaines d'années mais qui aurait disparue - dernière observation en 1970 ! Heureusement, d'autres formes sont encore présentes dans divers pays, y compris en Europe. La plante est formée d'un tige à croissance continue qui forme des feuilles disposées selon les rayons d'une étoile, ce que l'on appelle un verticille, et terminée par un piège actif, très ressemblant à celui de la Dionée. Aldrovanda en est sa plus proche parente mais la taille du piège est très inférieure, de l'ordre de 3-5 mm. Cette plante est pratiquement translucide, ce qui la rend très difficile à photographier. La fermeture est bien plus rapide que celui de la Dionée, ce qui peut s'expliquer déjà par la taille plus réduite.

Première étape

Pour réussir sa culture, je conseille une technique - personnelle mais qui rejoint ce que j'ai lu depuis. Il faut créer d'abord un milieu stable dans un récipient avec ce que j'appelle une "eau de tourbe" (voir pour cela l'article sur la rectification du pH, dans la F.A.Q.) mais un fond de quelques centimètres formé d'un terreau issu de la décomposition de feuilles. Vous trouverez peut-être ce matériau tout simplement au fond de votre cuve de récupération d'eau de pluie ! L'idéal est d'ajouter un peu de tourbe (disons 10 %) pour stabiliser un peu plus le milieu, limiter la décomposition. En effet, je pense que cette sorte de "terreau" libère pas mal de sels minéraux préjudiciables en soi à Aldrovanda et qui favorise la prolifération des algues. Celle-ci devient vite incontrôlable. Il a été montré chez diverses plantes carnivores aquatiques qu'elles étaient capable de favoriser cette prolifération à leur surface car dans les milieux pauvres c'est apporter une nourriture rare qui va attirer les proies. Aldrovanda est facilement recouverte par celle-ci, ce qui est bénéfique pour elle tant que sa photosynthèse n'est pas gênée, ce qui arrive facilement. Mais la tourbe libère des acides humiques (qui font son acidité) avec la capacité de bloquer ces sels minéraux, plus particulièrement les métaux contenus dans les sels. C'est le principe des chélates, utilisés par exemple dans certains engrais spécialisés, pour transporter des éléments normalement peu solubles ou qui le deviennent, comme le fer.
Pour ralentir les échanges avec l'eau et limiter l'enrichissement de l'eau par le terreau, je recouvre celui-ci d'une pellicule de quelques millimètres de sable, qui en plus maintient un peu les débris au fond.

Des algues vont alors se développer. Le milieu est déjà très bon mais instable : il dérive immanquablement vers une invasion par les algues filamenteuses, très préjudiciables à Aldrovanda tout comme aux Utriculaires. De manière générale, l'implantation de plantes aquatiques oxygénantes comme des Élodées est bénéfique car elles absorbent très vite les sels minéraux à la place des algues sans avoir leur inconvénient et en libérant beaucoup d'oxygène, un élément indispensable et sensible pour le développement des Daphnies, Cyclops, etc. consommés par nos Aldrovanda.

Pour limiter ses algues filamenteuses, j'ai imaginé une technique basée sur la concurrence avec des algues microscopiques, assez efficace. Si vous avez remarqué dans de l'eau de mare, des récipients dans le jardin, etc. des massses vertes apparemment peu organisée, il s'agit de colonies d'algues microscopiques non filamenteuses. Vous pouvez prélever délicatement de cette masse, remplacer doucement l'eau du milieu par l'eau destinée à vos Aldrovanda (l'eau originelle pouvant être très calcaire par exemple), secouer l'ensemble pour éclater la masse des algues puis filtrer avec une maille de 1 ou 2 mm : de cette manière vous aller récupérer une eau verdâtre très riche en algues qui fourniront une bonne nourriture pour la micro-faune sans gêner les Aldrovanda. Le filtre retient la quasi totalité des algues filamenteuses. Il faut juste se souvenir qu'en automne celles-ci forment des sortes de sphères qui vont rester en repos pour redonner un filament dès que la température va augmenter : autant dire que ces sphères traversent les mailles !

Aldrovanda pourra être placée là en sécurité au bout d'une quinzaine de jours. Si vous avez assez de plantes vous pouvez tenter de produire le phénomène extraordinaire suivant, que j'ai trouvé un peu par hasard.

Deuxième étape

Le truc alors, consiste à placer ce récipient, qui ne doit donc pas être trop grand, dans un contenant plus grand comme un terrarium, et qui comporte une sorte de ramequin (ustensile de cuisine à fond plat destiné à contenir les crèmes desserts, etc.) avec une culture de levure, par exemple un peu de pomme écrasée (je la cuis auparavant au micro-onde) avec de la levure et un morceau de sucre. Dans le terrarium la quantité d'air disponible va permettre aux levures de produire une grande quantité de gaz carbonique CO2. Un peu d'alcool peut être produit (reconnaissable à l'odeur) puis de l'acide acétique, donnant une très forte odeur de vinaigre : pour lutter contre cela, j'ajoute un morceau de calcaire qui réagit avec cet acide et le bloque dans le mélange - en relachant d'ailleurs encore du CO2 !
Non seulement le CO2 est excellent pour la croissance des plantes mais en plus cela va produire une réaction extraordinaire : tous les acides organiques présents dans l'eau contenant l'Aldrovanda vont précipiter. Tout va se recouvrir d'un dépôt brun. Personnellement, j'ai retiré celui-ci de l'Aldrovanda en la remuant légèrement avec une pince car il est un peu comme de la neige, sans réelle adhérence. Après le premier jour, le dépôt se prolonge quelques jours mais beaucoup plus faiblement. Les algues vont disparaître. Les bestioles vivants dans le milieu périssent, à l'exception de vers comme les Tubifex qui survivent dans les eaux polluées. Contre toute attente, Aldrovanda est alors comme un poisson dans l'eau : elle se met à pousser de toutes parts, à se diviser abondamment, même au niveau des têtes ! Les pièges deviennent très gros par rapport au reste du limbe, atteignant à peu près la moitié.

J'ai bien conscience que c'est un peu en contradiction avec mes explications du début : si les acides précipitent avec le CO2, c'est sans doute aussi parce qu'il libèrent à leur tour les métaux emprisonnés... Oui, ce n'est pas faux mais il y a sans doute une question de proportion, d'équilibre chimique... A noter que la réaction semble facililitée autour des 30 °C et inexistante en dessous. La solubilité du CO2 dans l'eau diminue avec la température : tout se passe comme si une forte concentration en CO2, vers 15 à 20 °C, avait stabilisé le produit...

Stabilisation

Il n'est pas évident de conserver longtemps cette teneur en CO2.

Je pense qu'une fois cette teneur atteinte, il faudrait jeter la plus grosse partie de la levure : le peu qui reste mettra plus de temps à décomposer le sucre ce qui permettra une production de CO2 d'entretien.

Pour l'instant j'ai essayé d'autres techniques, d'autres expériences, mais avec un résultat moins bon.

Quand j'ai observé ces résultats un été, je n'avais au début que 4 ou 5 brins donc peu de matériaux pour expérimenter.

En milieu d'été, certains brins ont pris une couleur rouge ou plutôt d'un beau rose. J'ai voulu augmenter l'effet en plaçant ces plantes dans la serre, beaucoup plus éclairé, mais sans CO2. En fin de saison, j'avais à peu près un cinquantaine de brins qui poussent dans une eau "normale", fortement envahie par les algues. La coloration n'a pas augmenté

Contrairement à ce que l'on peut lire, il ne faut pas tenter de produire du CO2 dans un récipient clos dont le gaz sort par un tube terminé par un bulleur d'aquarium : sur le papier ce serait une bonne idée mais, en pratique, l'absence rapide d'air fait passer les levures en mode anaérobie c'est-à-dire en fermentation. On obtient alors évidemment non plus du CO2 mais de l'alcool ! ce qui nuit d'ailleurs rapidement au développement des levures. Cela marcherait, en revanche, en envoyant de l'air dans les levures par un deuxième tuyau et en récupérant ce qui en sort comme auparavant. Certaines personnes compensent l'agressivité de l'alcool en utilisant de la levure récupérée dans de la bière (bière blanche, notamment) car les souches utilisées y résistent mieux. Vous pouvez bien sûr utiliser cette levure mais essayez tout de même comme j'ai expliqué...

Hypothèses

On peut lancer quelques idées :

  • Les acides organiques ont la particularité de bloquer (on dit "séquestrer") les métaux, en particulier justement les métaux lourds qui, comme par hasard, ont la réputation de faire disparaître cette plante, tout au moins quand ils sont à l'état libre dans l'eau - que l'on peut qualifiée de polluée. Si Aldrovanda parvient à les absorber, elle peut assimiler des sels minéraux présents en faible quantité mais transportés par ces substances.
    En leur absence, il semble d'ailleurs que ces métaux se concentrent dans la plante au niveau des vacuoles, entraînant le noircissement puis la mort. J'ai observé et photographié de telles structures au microscope, qui disparaissent remarquablement lorsque l'on replace les plantes dans de l'eau correcte. J'ai trouvé ce résultat vraiment surprenant. A la mort des cellules, le contenu des granules se disperse et les parois se décomposent d'où les zones sombres et voilées de la photo. En leur présence l'eau se trouve ainsi purifiée.
  • Aldrovanda a tellement évolué vers la carnivorité qu'elle me semble capable d'assimiler la matière organique présente dans l'eau sans doute directement par tout le corps - il y a des glandes globuleuses un peu partout sur les tiges et je n'ai rien lu sur leur fonction.
  • Il est capable de stocker l'oxygène qu'il produit dans le très important réseau lacunaire qui le parcourt. De ce fait, il peut très bien vivre en l'absence d'oxygène dans le milieu pendant la nuit, lorsqu'il le consomme comme toute plante verte. Les algues n'ont pas cette particularité. Elles ne peuvent qu'utiliser l'oxygène de l'eau... Elles périssent donc lorsqu'il n'y en a plus et cessent alors d'envahir les Aldrovanda.
  • Les animaux périssent aussi, y compris les Limnées. Cela ajoute de la matière organique...
  • Du coup, Aldrovanda peut utiliser parfaitement et exclusivement tout le milieu et toute la lumière.

  • Acides humiques

    Une méthode connue consiste à ajouter des acides humiques à l'eau or, ce sont justement pour l'essentiel de tels acides que l'on voit précipiter.

    On pourrait croire que cet ajout agit de la même manière mais c'est faux. Je n'ai pas encore utilisé ces acides mais il ne faut pas oublier que le CO2 n'en ajoute pas, ce serait même le contraire : les acides ionisés qui étaient dissouts sont rendus insolubles par la baisse du pH provoqué par sa dissolution dans l'eau.

    Si vous voulez faire des expériences, je peux vous donner ma méthode pour fabriquer ces acides humiques très facilement à partir de tourbe (voire de terreau), de soude caustique (par exemple un produit déboucheur d'évier), et un acide minéral classique. La soude se combine avec les acides organiques peu solubles présents dans la tourbe pour donner des sels solubles que l'on décante. A ce stade c'est le même principe de fabrication que pour le savon, sauf que le corps gras utilisé est remplacé par la tourbe. La solution obtenue avec la soude, d'humates de sodium, est suffisamment "visqueuse" pour ralentir la décantation de la tourbe restante et la filtration est difficile à réaliser pour les mêmes raisons, à quoi s'ajoute éventuellement une attaque du papier-filtre, ce qui bouche ses pores : il vaut mieux laisser reposer une bonne semaine et ne prendre que le liquide surnageant.
    Ce liquide mis en présence d'acide redonne les acides organiques insolubles, que l'on voit précipiter en donnant une masse brunâtre : c'est ce qui se passe avec le CO2 par la méthode "naturelle".
    Les acides humiques qui se déposent doivent être lavés modérément pour supprimer les sels résiduels, dans un eau non calcaire légèrement acide et froide afin d'éviter de redissoudre ces acides humiques. N'oubliez pas qu'il est plus efficace de rincer plusieurs fois avec peu d'eau qu'une fois ou deux avec beaucoup ; c'est facile à démontrer car les dilutions se multiplient alors que les volumes s'ajoutent...
    J'utilise de préférence de l'acide sulfurique car le sulfate de sodium résiduel est assez neutre pour les plantes. Je pense qu'il peut être envisagé d'utiliser d'autres acides à la place d'acide sulfurique selon la disponibilité. L'acide chlorhydrique donne du chlorure de sodium, c'est-à-dire du sel de cuisine : il se trouve qu'Aldrovanda pousse en eau saumâtre en Inde et donc ne devrait pas être gêné par une telle présence ; cela n'est pas le cas des algues d'eau douce en général et peut être intéressant (peut-être) pour limiter leur croissance... L'acide nitrique donne du nitrate de sodium, extrêmement soluble dans l'eau donc facilitant le lavage final ; ses traces seront métabolisées par les plantes, puisque c'est un engrais de base à action rapide qui contient 16 % d'azote - soit un N-P-K de 16-0-0.

    Dernières expériences

    Je sais que beaucoup de personnes perdent leur Aldrovanda pendant l'hiver : les turions coulent et ne remontent jamais. J'ai donc souhaité les surveiller.
    On lit souvent qu'il faut un fond de tourbe pour les conserver pendant cette période. J'ai pensé que le pH y était pour beaucoup : sans l'acidité de la tourbe, les restes des Aldrovanda tombés au fond se décomposent et libèrent les substances toxiques qui ont été stockées pendant la belle saison, comme les métaux lourds. J'ai placé les turions dans un bocal contenant de l'eau de tourbe bien propre avec quelques algues non filamenteuses et le plancton habituel. Le récipient a été placé hors gel avec juste assez de lumière pour la survie des algues.

    La reprise de la végétation s'est déclenchée sans problème, surtout pour la forme verte tropicale australienne. Je l'ai cultivée avec les autres formes et elle pousse beaucoup plus vite. Du coup, j'ai essayé de l'eau de diverses origines et j'ai obtenu à chaque fois ce résultat. Je conseille donc cette forme très prolifique à celui qui veut débuter avec cette espèce, qui est d'ailleurs la seule à fleurir en culture et à donner des graines viables.

    Parmis les essais, j'ai voulu récupérer la matière organique venant d'une forme rouge qui s'était décomposée pendant l'hiver. Un peu comme pour les autres plantes, je pensais fournir ainsi une composition idéale puisque venant d'elle-même. Je sais maintenant que ce n'est pas une bonne idée pour les raisons évoquées plus haut. J'ai rajouté cette eau dans un récipient qui comportait la forme tropicale verte. Toujours est-il que placée dans les mêmes conditions de luminosité, élevée, cette forme verte est devenue plus rouge que la forme rouge !

    Si vous voulez vous procurer facilement un fond adéquat pour cette plante, je vois un moyen fort simple : lorsque vous rempotez vos plantes carnivores, il vous reste un substrat très riche en matière organique, micro-organismes et sels minéraux. Ce sont ces derniers qui rendent obligatoires le remplacement, en même temps que la circulation de l'air et de l'eau trop réduite à cause de la taille des fibres elle-même diminuée. MAIS vous pouvez très bien laver ce substrat à l'eau de pluie, laisser décanter, relaver le résidu une ou deux fois de plus. Le dépôt, lourd et insoluble, sera formé de vermiculite ou perlite et de particules organiques pauvres en sels minéraux. Vous pourrez le laisser glisser au fond de l'eau pour vos Aldrovanda, toutes la micro-faune en bénéficiera. L'idéal serait d'obtenir un milieu avec beaucoup de fibres visibles entre lesquelles les animalcules nageront et se nourriront.

    Contrairement aux pratiques fréquentes, je ne vous conseille pas d'utiliser un grand réservoir pour vos Aldrovanda, en tout cas si le milieu n'est pas parfaitement stable depuis longtemps, ce qui est très rare. La profondeur idéale est de 20 à 30 cm, c'est l'une des raisons de l'association avec les Carex (et non un lien un peu mystérieux) et vous pourrez beaucoup plus facilement contrôler le milieu, partager vos plantes pour en essayer plusieurs un peu différents. Un grand récipient peut faire illusion, vous aurez l'impression d'avoir réussi, vous laisserez faire... et arriverez trop tard lorsque la teneur en sels minéraux aura augmentée. Au mieux, vous aurez énormément de mal à inverser le processus et aucun milieu prêt à accueillir vos plantes en attendant le rétablissement. De même, évitez de laisser tomber les turions en hiver dans le fond de récipients profonds, cela marchera un an, deux ans, mais un jour... Le mieux est la culture continue, le retrait des turions à remiser au réfrigérateur (avec les graines) ou idéalement les deux.

    Conclusions

    On remarquera donc que tout cela est conforme à ce que l'on peut lire sur cette plante, à part quatre points :

    • La présence prétendue obligatoire d'êtres vivants. Cette croyance est issue des expériences réalisées sur des milieux artificiels. Mais ceux-ci n'utilisent pas, sauf erreur, de matière organique mais seulement des sels minéraux. Je vous conseille très vivement d'ajouter des Limnées (sorte d'escargot aquatique conique) car elles se nourrissent des algues qui étouffent souvent les Aldrovanda, rejettent du CO2 et de la matière organique libre et les jeunes seront abondamment consommées. Ces escargots, sous réserve qu'ils soient de petite taille (1 cm) lors de l'introduction, resteront petits et n'attaqueront JAMAIS vos plantes. Bien qu'Adamec donne comme exemple d'escargot les Planorbes, ces escargots plats en forme d'Ammonite, je vous les déconseille formellement car ils les coupent au contraire ! Je ne partage pas non plus son point de vue au sujet de la libération gênante d'azote et de phosphore par ces animaux, ce qui nuirait à la qualité de l'eau. Dans l'absolu, c'est exact, mais en réalité on voit très bien que les excréments, solides, tombent directement au fond et sont colonisés très rapidement par des micro-algues, bleues notamment, qui absorbent immédiatement les sels. Même si, peut-être, une partie de l'azote passe sous forme liquide (urine ?) la quantité d'algues absorbées sur les Aldrovanda sera supérieure à la quantité d'algue en tout genre (y compris diatomées ou desmidiées, non problèmatiques) que cela pourrait permettre de favoriser. Le bénéfice est donc supérieur au désavantage théorique. Évidemment, il faut exclure en revanche l'utilisation de poissons dans un bassin...
    • Le pH conseillé de 6.5. C'est vrai qu'il ne doit JAMAIS être au dessus et c'est un point à surveiller mais les meilleurs résultats sont obtenus avec des pH plus faibles, de l'ordre de 5, qui correspond aux conditions décrites avec le CO2. Il semblerait qu'en soi, un pH jusqu'à 7.4 puisse convenir mais vous risquez surtout avoir de grandes difficultés à conserver une teneur en CO2 élevée tout simplement, sans compter que la teneur en sels minéraux risque d'être elle aussi élevée. C'est l'augmentation du pH qui est mauvais signe, plus que cette valeur elle-même.
    • Pour moi, il n'existe pas de formes tropicales et de formes tempérées :
      • les "formes tempérées" peuvent rester indéfiniment en culture continue (sans arrêt de croissance en hiver),
      • les "formes tropicales" produisent des turions ! J'en ai eu quelques plants qui sont restés dehors en hiver et même ont été pris dans la glace et ils sont repartis au printemps. Ceci est absolument contraire à l'idée même de forme tropicale, au sens botanique du terme.
    • Même remarque pour la forme rouge (voir ci-dessus). OK, certaines rougissent plus que d'autres dans les mêmes conditions, mais cela s'arrête là.
    • En revanche, cultivées ensemble donc dans les mêmes conditions (c'est très important) les formes vertes australienne et européenne par exemple ont des différences morphologiques : le limbe des feuilles de la première est beaucoup plus large et les pointes qui en partent sont un peu plus courtes. Je n'ai pas fait une telle culture en parallèle avec les deux formes australiennes (verte et rouge) mais la forme rouge semble toujours plus frêle que la verte. Des comparaisons de l'ADN ont été réalisées en Australie, si vous avez des informations, merci de me contacter...
    Aldrovanda européenne (polonaise) en haut et australienne verte en bas. On remarquera que la première a des limbes plus étroits aux cils plus longs et par trois (et non cinq). Il est possible que cela ne soit pas la règle !

    Vous avez ici quelques pistes de recherche : j'espère que vous me ferez part de vos découvertes qui seront rapportées dans cette page.

    Théorie personnelle sur la disparition de France

    Voici une photo, médiocre mais qui montre néanmoins un curieux phénomène. J'avais observé cela en 1997. Lorsque l'on place Aldrovanda dans l'eau naturelle de Lacanau (et non La Canau comme l'écrit Degrief), lieu où il vivait autrefois, la réaction est immédiate : il se met à pousser avec les feuilles de plus en plus courtes, donnant un aspect d'arbre de Noël très marquant, jusqu'à l'arrêt complet de la croissance au bout de deux centimètres environ. J'ai utilisé l'eau venant plus précisément du Lac du Moutchic (improprement appelé "Lac de Lacanau"), dans lequel se déverse un courant selon un mode fréquent au niveau des lacs et étangs du Sud-Ouest, aux pH acides et riches en matières organiques. J'ai prévu de faire un jour quelques expériences en ajoutant des acides humiques ou d'autres produits pour aquariophiles ayant un rôle purifiant mais la réponse est certainement ailleurs. Dans la mesure où se trouve des Drosera intermedia en abondance dans l'ile au centre du lac, on peut penser qu'il y a un problème qui ne vient pas des engrais (pas de signes, du reste, dans le lac) ou d'herbicides... Laurent Legendre m'a dit que cela lui faisait penser à une carence en bore ("boron" en anglais) et, bien plus tard, j'ai obtenu un article qui décrivait quelque chose d'analogue chez Aldrovanda et qui était compensable justement par un ajout ! Il faudrait donc refaire l'expérience tout simplement en ajoutant ou non cet élément chimique naturel qui fait partie des oligo-éléments nécessaires aux plantes, donc à l'état de traces. Si cela s'avère être la clé, alors j'ai une théorie originale qui pourrait expliquer la disparition de la plante dans le Sud-Ouest, aux alentours des années soixante mais qui va à l'encontre de toutes les idées reçues. En effet, je ne suis pas loin de penser que si Aldrovanda a disparu de sites français tel que Lacanau ce n'est peut-être pas à cause de la pollution mais du manque de pollution ! Je m'explique : autrefois la lessive était faite au lavoir avec des lessives et savons riches en borates, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui, et les eaux s'écoulaient librement dans les cours d'eau et les étangs. Les engrais sont préjudiciables pour Aldrovanda, certes, mais à mon avis c'est surtout indirect : ils sont très rapidement recouverts d'algues, c'est même incroyable comme elles se fixent rapidement dessus, on dirait des aimants... Comme j'en ai parlé plus haut, c'est une adaptation qui attire les proies.

    Documents complémentaires

    Photographie au microscope montrant les glandes digestives d'Aldrovanda (coloration au Rouge neutre). On distingue aussi un poil sensitif au milieu, qui traverse la photo verticalement. En cliquant vous pourrez aussi voir les chloroplastes, organites globuleux bourrés de chlorophylle qui leur donne une couleur vert-jaune - et non pas verte. (Je n'ai pas indiqué le grossissement pour l'instant.)

    En 1997, j'ai filmé - en analogique à l'époque - avec beaucoup de difficultés la fermeture des pièges. Cette plante est pratiquement translucide, ce qui la rend très difficile à photographier. La fermeture est bien plus rapide que celui de la Dionée. Voici le moment crucial d'une capture... C'est aussi une capture... d'images !
    Au contact d'une larve de moustique, tenu à l'aide de pinces brucelles, le piège était en train de se refermer lorsqu'il a été figé dans un flou de mouvement caractéristique.
    Un autre piège, tout en bas au milieu, est encore ouvert et immobile. Les autres pièges sont fermés, ce qui donne cette apparence de vésicules qui à donné son nom à l'espèce, Aldrovanda vesiculosa, terme finalement inadéquat.

    J'ai réalisé la capture numérique de la vidéo au format compressé MPEG-2 pratiquement de qualité TV et mis cela en ligne. C'était en 2002, manifestement la première fois sur le Net... En observant ce film attentivement, vous remarquerez que, comme la Dionée, Aldrovanda nécessite deux contacts successifs sur les cils sensitifs : au moment où  je pousse la larve de moustique dans la plante, l'animal entre forcément en contact avec les cils mais n'est pas emprisonné et se rétracte sans problème. Mais lorsqu'il se raidie de nouveau, un deuxième contact déclenche la fermeture de la trappe.

    Télécharger Flash Player chez Macromedia pour voir le lecteur Flash et la vidéo.

    J. Philippe ROSELLO