TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE
DE BORDEAUX

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

-------------

N°04/00798

DU : CINQ JUILLET DEUX MIL QUATRE

3 copies

DEMANDERESSE AU REFERE

L'Association DIONEE, prise en la personne de Monsieur Romuald ANFRAIX, dont le siège social est sis Jardin Botanique du Parc de la Tête d'Or, 69000 LYON

représentée par Me Emmanuel LUDOT, avocat au barreau de REIMS

DEFENDEUR AU REFERE

Monsieur Jean Philippe ROSELLO, demeurant xxxxxxxxxxxxxx 33000 BORDEAUX

représenté par Me Alain PAREIL, avocat au barreau de BORDEAUX

LE PRESIDENT : Christian RISS

LE GREFFIER :   Christelle LUCAS

DEBATS :              A l'audience publique du 28 Juin 2004

ORDONNANCE : Prononcée à l'audience publique du 05 Juillet 2004

GROSSE le
COPIE le
à


 

Par exploit en date du 13 avril 2004, l'association DIONÉE, association française des amateurs de plantes carnivores, a assigné en référé Monsieur Jean-Philippe ROSELLO aux fins de voir :

Ordonner à Monsieur Jean Philippe ROSELLO de cesser toute utilisation du nom de domaine "dionee.org" sous la sanction de 1.000 € par infraction constatée;

Condamner Monsieur Jean Philippe ROSELLO au paiement d'une somme de 2.000 € par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, qui comprendront également les frais de constat du ministère de la SCP Franck CHASTAGNARET et ROGUET, huissiers de justice associés à LYON.

A l'appui de sa requête, elle expose avoir confié à Monsieur Jean- Philippe ROSELLO, lorsqu'il était membre de l'association, le soin de mettre en place un site Internet avec comme nom de domaine "dionee.org" et avoir remboursé à Monsieur ROSELLO les frais liés à l'achat du nom de domaine "dionee.org" de sorte qu'elle en est propriétaire.

Or, Monsieur ROSELLO, alors qu'il n'était plus membre de l'association, n'a pas hésité à utiliser ce nom à des fins personnelles et menace d'en effectuer la suppression, rendant alors son utilisation impossible pendant plusieurs semaines, et cela à quelques mois de l'organisation d'un congrès international pour l'association, les bulletins d'inscription pour ce congrès étant disponibles sur le site de l'association (www.dionee.org).

Ainsi, l'introduction en justice de la présente procédure est devenue nécessaire.

     Monsieur Jean Philippe ROSELLO résiste à cette demande en faisant valoir :

- que l'association DIONÉE ne justifie pas de sa capacité juridique à agir en justice;

- que le procès verbal de constat d'huissier qu'elle verse aux débats est dépourvu de toute force probante;

- qu'il a personnellement créé le nom de domaine "dionee.org" à son initiative, chez son propre "registrar" par son fournisseur d'accès personnel et en son nom propre;

- que l'association DIONÉE n'a jamais déposé son propre nom de domaine, lui-même mettant gracieusement à disposition le nom "dionee.org". et s'occupant de sa redirection vers le site crée par l'association ayant pour adresse : " http://site.voila.fr/dionee";

- qu'il a communiqué par courriel la marche à suivre avec les codes nécessaires pour que l'association DIONÉE récupère la gestion du nom de domaine "dionee.org" chez un autre "registrar" de son choix;

- que l'association DIONÉE ne rapporte pas la preuve du dépôt de son nom auprès de l'I.N.P.I. en tant que marque DIONÉE;

- que les noms de domaine ne font l'objet que d'un simple droit d'usage, régi par la règle "le premier arrivé est le premier servi", de sorte que l'association DIONÉE n'est pas fondée à demander sa condamnation à cesser toute utilisation du nom de domaine "dionee.org" faute d'être titulaire d'un droit d'occupation et ou du droit d'usage de ce nom de domaine.

Il sollicite enfin un montant de 2.000 € au titre de l'indemnisation de ses frais irrépétibles.

A l'audience publique du 28 juin 2004, les avocats des parties ont repris les termes de leurs écritures respectives.

 

SUR CE:

Attendu que Monsieur Jean Philippe ROSELLO soulève avant toute défense au fond une fin de non-recevoir sur le fondement de l'article 122 du nouveau code de procédure civile en prétendant que l'association DIONÉE requérante ne justifie pas de sa capacité juridique à agir en justice par la production d'une déclaration préalable à la préfecture de son siège social;

Attendu que l'article 5 de la loi du 1er juillet 1901, modifié, dispose à cet égard:

"Toute association qui voudra obtenir la capacité juridique prévue par l'article 6 devra être rendue publique par les soins de ses fondateurs.

La déclaration préalable en sera faite à la préfecture du département ou à la sous-préfecture de l'arrondissement où l'association aura son siège social. Elle fera connaître le titre et l'objet de l'association, le siège de ses établissements et les noms, professions, domiciles et nationalités de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de son administration ou de sa direction. Deux exemplaires des statuts seront joints à la déclaration. Il sera donné récépissé de celle-ci dans le délai de cinq jours…";

Attendu qu'il s'en suit que toute association peut valablement ester en justice à condition d'avoir été déclarée régulièrement dans les conditions précitées; qu'elle est alors représentée par la personne physique ou l'organisme investi de ce pouvoir par les statuts;

Attendu que si l'article 4 des statuts de l'association DIONÉE désignent son président pour la représenter dans tous les actes de la vie civile, et notamment pour ester en justice, il n'en demeure pas moins que l'association requérante ne justifie pas avoir été régulièrement déclaré conformément aux dispositions de l'article 5 de la loi du 1er juillet 1901;

que les statuts de l'association DIONÉE sont par conséquent inopposables aux tiers

qu'en outre Monsieur Jean Philippe ROSELLO était bien un tiers à la date de l'assignation en référé, pour ne plus avoir été membre de l'association selon les écritures qu'elle a fait déposer par son Conseil, conclusions d'assignation et conclusions récapitulatives;

Attendu dans ces conditions que la fin de non-recevoir opposée par Monsieur Jean Philippe ROSELLO est fondée, l'association DIONÉE étant dépourvue du droit d'agir en justice;

que la requête en référé ne peut de ce fait qu'être déclarée irrecevable;

Attendu cependant que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application en faveur de quiconque des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

Attendu enfin que l'association DIONÉE, qui ne voit pas aboutir ses prétentions, supporte la charge des entiers dépens qui seront liquidés comme en matière d'aide juridictionnelle pour ceux engagés par le défendeur.

PAR CES MOTIFS :

Le juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

DÉCLARE l'association DIONÉE irrecevable pour défaut de droit d'agir;

DIT en conséquence n'y avoir lieu à référé;

DÉBOUTE les parties de leurs prétentions respectives sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile;

CONDAMNE l'association DIONÉE aux entiers dépens qui seront liquidés comme en matière d'aide juridictionnelle pour ceux engagés par le défendeur.

La présente ordonnance, prononcée en audience publique le 5 juillet 2004, a été signée par Monsieur RISS, président, et Mademoiselle LUCAS, greffier.

EN CONSEQUENCE

LA REPUBLIQUE FRANÇAISE

Mande et Ordonne :

A tous huissiers de Justice sur ce requis de mettre la présente ordonnance à exécution.

Aux Procureurs Généraux et aux Procureurs de la République près les Tribunaux de Grande Instance d'y tenir la main.

A tous Commandants et Officiers de la Force Publique de prêter main forte lorsqu'ils en seront légalement requis.

En foi de quoi, la minute de la présente ordonnance a été signée par Monsieur le Président et par le Greffier.

La présente, délivrée par Nous, Greffier en Chef soussigné,

[Signature]

od. n°1