Une lente évolution des nappes d'eauSous l'action de la végétation les nappes d'eau tendent naturellement au comblement. Voyons d'abord le cas d'une eau riche en matières nutritive Eaux dormantes riches en substances nutritivesLa production végétale est importante, donc celle de l'humus (lac
eutrophe). On appelle marais les zones où les plantes sont partiellement ou totalement émergées. C'est à ce stade évolutif que se développe les tourbières. La forêt marécageuse apparaît ensuite, des débris de plantes s'accumulent sur le sol, la nappe phréatique s'enfonce et c'est la forêt classique qui termine l'évolution (c'est ce que l'on appelle le climax).
Eaux dormantes pauvres en substances nutritivesLe mécanisme sera comparable avec des plantes adaptées, un peu différentes. Il y aura une proportion beaucoup plus grande de matière végétale dans les dépôts. La tourbière apparaîtra donc plus vite, surtout si la production de matière organique est fortement excédentaire (lac dystrophe) que si elle l'est faiblement (lac oligotrophe). Formation des tourbièresOn trouve dans l'Encyclopédie Universalis : "Tout marécage n'est pas une tourbière. Pour être une tourbe, le dépôt palustre doit renfermer au minimum 20 p. 100 de matière organique s'il est dépourvu d'argile, 30 p. 100 s'il est fortement argileux (M. Jamagne, 1967), proportions souvent dépassées ; des teneurs inférieures (entre 12,5 et 20 p. 100) caractérisent des sols paratourbeux." Le mécanisme de formation des tourbières est complexe. Il y a accumulation de matière organique liée à une conjugaison entre :
La formation de la tourbeAu plus profond des lacs (sapropel, où le calcaire peut même s'accumuler par précipitation formant une craie lacustre typique aux fossiles typique : Limnée, Planorbe, Physe...) l'action des bactéries décomposeuses est élevée mais incomplète par carence d'oxygène. Il y a une carbonisation spontanée : les molécules organiques perdent leur azote, leur oxygène voire leur soufre et l'excédent donne des hydrocarbures. Cette carbonisation fournit un matériau brun, presque noir, qui préserve une partie des structures végétales. C'est la tourbe. Les différents végétaux d'origine donne différentes sortes de tourbe (v. planche) qui conserve la disposition en couches. De plus, les couches supérieures sont de plus en plus acides et pauvres en sels minéraux. Les Sphaignes (genre Sphagnum) envahie progressivement la tourbière en formation. Ces explications font appel à des mécanismes isolément observables
par des expériences, mais dans la nature l'excédent de matière organique est
très faible et absolument pas à notre échelle : en réalité la décomposition
reste tout de même importante et l'accroissement de la couche de tourbe est seulement de l'ordre
de 35 mm par siècle ! L'importance des épaisseurs observables n'est dû qu'à
une seule chose : ces tourbières fonctionnent souvent depuis plus de 10.000 ans (et même
2 millions d'années dans certains cratères du Massif Central, en France) ! La tourbière bombéeLes Sphaignes ont quatre particularités extraordinaires: De plus, elles forment des tapis qui tendent à étouffer le reste de la végétation. L'acidité étant installée et entretenue, même un apport d'oxygène par une circulation d'eau ne permet plus la décomposition. Cette eau "circulante" (pluie...) entraîne les quelques sels minéraux apparus, ce qui maintient les sols pauvres et empêche donc les autres plantes de se développer. En outre, le sol obtenu ne contient que de la matière organique et ne bénéficient même pas des particules argileuses, contenus dans les sols habituels, qui retiennent les sels minéraux. Le pourtour de la tourbière est plus sec et occupé de ce fait par des arbres : c'est bien l'humidité qui limite la progression de la forêt. La tourbière bombée est donc un milieu hostile qui comprend très peu d'espèces : Eriophorum, Erica tetralix, Calluna, Myrica gale, Drosera rotundifolia, etc. qui se caractérisent par des adaptations à l'irrégularité des conditions d'humidité (par enroulement des feuilles, réserves, etc.) et à la pauvreté du sol (consommation d'insectes, de pollen). Il suffit d'augmenter la température et surtout d'augmenter le pH par du
calcaire (amendement) pour provoquer le décomposition de la matière organique, phénomène
accéléré par une oxygénation. Ainsi, l'absence d'oxygène n'empêche
pas seule la décomposition. Le gaz des marais (méthane) en est d'ailleurs la preuve.
Du reste, certaines bactéries (les méthanobactéries, par exemple) sont même
tuées par l'oxygène... Dans la première phase, on trouve successivement depuis le fond vers le bord une vase plus ou moins organique et décomposée, une boue tourbeuse, une tourbe de Roseaux, une tourbe de Carex et une tourbe d'humus forestier. Ces tourbes, dites "tourbes brunes" sont en général médiocres pour les plantes carnivores car peu acides donc instables. Dans la deuxième phase, les dépôts finissent par réduire l'étendue d'eau et sa profondeur. Dans la troisième phase, il n'y a plus vraiment d'eau visible, les arbres recouvrent l'ancien étang et le dépôt d'humus forestier enfouit la nappe phréatique. Dans la quatrième phase, l'humus forestier acide et gorgé d'eau favorise la croissance de la Sphaigne qui acidifie encore plus le milieu. L'acidité provoque la régression de la forêt et l'envahissement par la Sphaigne. Les plantes carnivores se développent très bien dans ce milieu très pauvre et acide. La Sphaigne des zones centrales vit dans de meilleures conditions que celle des zones pionnières périphériques (pas forcément de même espèce) : elle pousse donc plus vite et avec une tendance a "retomber" vers l'extérieur. Cela forme des dômes dans les meilleurs conditions. Où trouver des tourbières ?De ce qui précède, il s'ensuit que l'on trouvera,
en France, plus facilement les tourbières dans les zones froides, c'est-à-dire davantage
en montagne, à une altitude décroissante avec la latitude, phénomène comparable
à celui constaté pour les différentes étages de la végétation
: les espèces montagnardes poussent plus bas lorsque l'on est plus au nord. Vous trouverez
dans ce site des cartes de France représentant ses régions
de tourbières. Les plantes sont adaptées à leur milieu et le pH est un facteur important, d'autant qu'il est lié à d'autres facteurs. Voici un tableau représentant quelques espèces communes révélatrices des sols. Vous trouverez, bien sûr, bien d'autres espèces dans ou près des tourbières (à commencer par les plantes carnivores !). Certaines seront là, toutefois, parce que le milieu est humide : elles supportent l'acidité mais ne la recherchent pas. ![]() A remarquer que les plantes acidophiles sont en réalité calcifuges : en clair cela veut dire qu'elle ne poussent pas mieux dans un sol acide mais plutôt qu'elles périssent dans un sol alcalin, très généralement calcaire. En effet, ces plantes n'ont aucune aptitude pour résister à l'entrée du calcium dans leur tissus, contrairement aux autres. Les plantes calcicoles y résistent très bien, ce qui donne l'impression qu'elles apprécient le calcaire : elles croissent en fait là où elles sont les seules à pousser
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